27
Sep
2017
Table ronde de l’ASPC avec les groupes de patients
Le 13 septembre 2017, dans les bureaux de l’Agence de santé publique du Canada (ASPC), a eu lieu une table ronde avec les représentants de patients atteints de la maladie de Lyme du Canada et des hauts dirigeants de l’ASPC.
La rencontre de 4 heures était présidée par la Dre Siddika Mithani, présidente de l’Agence de santé publique du Canada, en compagnie de la Dre Theresa Tam, administratrice en chef de la santé publique du Canada et du Dr Howard Njoo, sous-administrateur en chef de la santé publique du Canada. Steven Sternthal, directeur général à l’ASPC du Centre des maladies infectieuses d’origine alimentaire, environnementale et zoonotique, était également présent, ainsi que des représentants de l’Institut de recherche en santé du Canada, venus présenter les détails du nouveau réseau de recherche sur la maladie de Lyme annoncé en mai 2017 par la ministre de la santé de l’époque, Mme Philpott.
Les représentants de patients nationaux et provinciaux présents étaient :
- Jim Wilson (CanLyme)
- Jennifer Kravis (LymeHope)
- Dr Ted Cormode (Victoria Lyme Awareness and Support Group, Colombie-Britannique)
- Krista Robertson (Lyme Disease Association of Alberta)
- Triant Steuart (Saskatchewan Lyme Disease Association)
- Marnie LePage (Manitoba Lyme & Tick-borne illness)
- Lesley Fleming (Lyme Disease Society of Canada, VOCAL Ottawa, Ontario)
- Linda Kelso (Ontario Lyme Alliance)
- Ellen Hohs (Lyme Ontario)
- Marguerite Glazer (Association québécoise de la maladie de Lyme)
- Donna Lugar (Maritimes and Atlantic Lyme Disease)
- Janet Higgins (Lyme NB, Nouveau-Brunswick)
Les représentants de patients s’étaient rencontrés plusieurs fois par téléconférence en prévision de la rencontre avec l’ASPC, et nous sommes arrivés unis et bien préparés, avec plusieurs documents de questions, réclamations et faits.
L’ordre du jour de la rencontre nous avait été distribué d’avance et comportait quelques questions sous les sections surveillance, éducation et sensibilisation et lignes directrices et pratiques exemplaires, les trois piliers du cadre fédéral déposé plus tôt cette année. Nous avons pris le temps de présenter nos réponses (en anglais) avant la rencontre et nous avons aussi soumis une courte liste de nos propres questions (en anglais) pour l’Agence, qui sont majoritairement restées sans réponse. Nous avons aussi reçu, en personne, la présentation qui allait guider le déroulement de la table ronde.
Au tout début de la rencontre, la présidente de l’ASPC, Dre Mithani, a pris le temps de lire 3 lettres qui l’avaient particulièrement touchées provenant de la campagne Lyme Letters de LymeHope à laquelle ont participé plusieurs Québécois. Elle était visiblement touchée, perturbée par ce qu’elle avait lu, et c’est avec émotion qu’elle a promis de faire avancer rapidement ce dossier pour le bien-être des Canadiens.
Nous avons remercié l’ASPC pour leur collaboration et avons communiqué notre désir de travailler en collaboration avec eux pour faire avancer les choses, de mettre de côté nos différents puisque ce qui importe le plus, ce sont les vies des Canadiens qui sont en jeu (Jennifer Kravis de LymeHope a lu cette lettre d’introduction, en anglais). Il y avait une grande unité au sein des représentants de patients, qui ont des priorités et une vision très similaires à travers le pays, et nous avons une solide fondation pour collaborer.
Bien que le cadre fédéral sur la maladie de Lyme ne reflète pas la voix des patients et était une grande déception, il n’est pas question d’y revenir en ce moment. L’ASPC avance plutôt vers un Plan d’action basé sur le cadre, soit l’implémentation d’étapes concrètes. Nous avons demandé à plusieurs reprises de voir la création d’un comité officiel de surveillance des actions à venir composé de docteurs, de scientifiques, de représentants de groupes de patients, d’experts réels de la maladie au pays, de représentants de la santé publique, etc. Ils se sont mis d’accord sur la mise en place d’un tel comité.
Nous avons été clairs que nous représentons les patients et que nous sommes en présence d’une vraie crise sanitaire. Il est critique d’offrir de la reconnaissance et de l’aide concrète aux patients malades maintenant et qui ne sont pas pris en charge, et de
prévenir les nouveaux cas de façon adéquate pour éviter des problèmes de santé de longue durée. Bien qu’ils soient compatissants envers la situation, cette problématique ne pourra pas être réglée du jour au lendemain. Les représentants de patients sont tous d’accord que nous allons pousser ce point le plus possible dans toute rencontre et intervention à venir, car pour nous c’est la priorité numéro un.Nous avons pris la vaste majorité de la rencontre à énumérer un à un les problèmes entourant la maladie de Lyme au Canada. La liste était longue, je vous assure! En résumé incomplet, nous avons parlé :
- de l’utilisation des lignes directrices ILADS, qu’on ne devrait plus supporter les lignes de l’IDSA de 2006;
- des conflits d’intérêt au sein de l’ASPC, surtout que 2 des personnes présentes sont médecins infectiologues;
- d’encourager l’éducation permanente et pertinente des médecins basée sur la science récente (pas juste érythème migrant, phase aigüe);
- d’encourager les médecins à développer des expertises dans la matière et pouvoir pratiquer librement; de clarifier que la définition de surveillance de la maladie de Lyme sur le site de l’ASPC ne constitue pas une base pour le diagnostic, sur ce point ils se sont engagés à clarifier l’information partagée sur le site de l’Agence;
- de prendre en compte toutes les injustices financières de perte de revenu sans compensation, sans versement de prime pour invalidité, sans reconnaissance juste de statut sanitaire au pays (pas de code diagnostic);
- de la nécessité d’avoir de meilleurs tests (ex. ELISPOT et ELISA C6 ensemble), de divulguer aux médecins les bandes des Western Blots;
- de la nécessité de pouvoir poser un diagnostique clinique dans tous les stades de la maladie, basée sur les signes et surtout symptômes, souvent invisibles;
- que les délais pour savoir si une tique est infectée sont beaucoup trop longs;
- que le temps d’attachement ne doit pas être de 24 heures minimum, ni que 70-80% des gens ont un érythème migrant classique;
- de travailler avec les populations des Premières Nations;
- de parler aux organisations médicales au pays pour les éduquer et s’assurer qu’ils transmettent des informations factuelles à leurs membres;
- des problèmes des co-infections qui ne sont pas prises en compte;
- des tiques qui ne sont pas à pattes noire mais qui rendent malade aussi;
- de créer des liens avec les vétérinaires habitués de la maladie de Lyme, pour aider à la surveillance;
- de la nécessité d’inclure les cas d’infection diagnostiqués hors protocole dans les statistiques nationale et provinciales, etc.
J’en saute, mais si vous pouvez y penser, ça a surement été dit!
Dre Mithani nous a questionné à savoir s’il y avait des avancées dans les provinces sur lesquelles on pouvait se baser, et le Manitoba et l’Ontario ont expliqué être en contact régulier avec leurs ministères de la Santé et qu’ils faisait avancer les choses lentement mais sûrement. Elle s’est engagée à faciliter un dialogue entre les groupes de patients provinciaux et les ministères de Santé provinciaux respectifs, et qu’ils allaient étudier les succès du Manitoba et de l’Ontario pour nous aider à les répliquer dans les autres provinces.
L’ASPC veut tout d’abord se concentrer sur les prochains 6 mois et mettre en place des actions avec des buts concrets mesurables. Les priorités sont la surveillance, l’éducation et la sensibilisation, et bien que ce ne soient pas nécessairement les domaines où nous voudrions nous concentrer dans leur forme actuelle, il y aura moyen d’influencer les actions à ce niveau-là pour le bien des patients et du public. Nous voulons aller de l’avant pour progresser là où il y a déjà une forme de consensus pour développer une relation de confiance.
Pour ce qui est du réseau de recherche sur la maladie de Lyme, ils ont passé quelque temps à nous présenter une mise à jour sur le réseau de recherche sur la maladie de Lyme de l’IRSC. Nous avons mentionné que 4 millions de dollars c’est bien peu pour les besoins criants de ce dossier. De plus, nous avons manifesté notre mécontentement face au fait d’avoir été exclu de ce processus jusqu’à maintenant, mis à part la communication récente de l’annonce préalable du réseau, et avons réitéré notre volonté à être impliqués. L’ASPC s’est engagée à créer un comité d’évaluation par les pairs pour surveiller les dépenses provenant de ce fonds de 4 millions de dollars pour la recherche et d’agir avec transparence, et qu’il inclurait même peut-être des patients. À noter que dans l’annonce préalable de ce fonds, on mentionne que : « Les demandes doivent comprendre un plan d’engagement des patients. Le processus d’évaluation fera appel à des patients et à des experts en engagement des patients, ainsi qu’à d’autres intervenants. Les patients devront jouer un rôle dans la gouvernance du réseau. », et nous allons voir à ce que ces engagements soient respectés et veiller à ce que la cohorte de patients présente un portrait fidèle à la réalité, et non seulement des cas officiels déclarés.
Les hauts dirigeants de l’ASPC présents se sont engagés à continuer à consulter toutes les parties prenantes, incluant donc les représentants de patients et aussi leurs experts médicaux et scientifiques, dans des discussions régulières et sur plusieurs années. Ils vont prochainement établir une feuille de route et des dates précises. Nous attendons présentement leurs notes sur notre rencontre, que l’AQML communiquera avec vous, et leur ferons suivre nos recommandations à ce moment-là. Nous sommes sortis de la rencontre avec l’espoir que bientôt, des actions concrètes vont améliorer la situation déplorable de la maladie de Lyme au Canada (et au Québec bien sûr!) et que nous établirons rapidement un partenariat avec l’ASPC pour embarquer dans tous les dossiers nécessaire